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 Trois cent mille voitures électriques pourraient actuellement circuler en France, pour une dépense de 7 centimes au kilomètre. La France est, après la Suisse, le deuxième pays du monde quant à la richesse en houille blanche et une grande partie de ses besoins, en énergie, pourrait être fournie par l'eau.

En cette période de restriction de la consommation d'essence, il était donc tout indiqué de développer la construction de voitures économiques électriques. Le problème n'est pas nouveau puisque la première voiture qui a dépassée les 100 kilomètres à l'heure, la "jamais contente", était une voiture électrique. Notamment dans les services publics - la grosse question étant celle des accumulateurs- il fallait en trouver de suffisamment légers et d'une suffisante capacité pour être utilisée sur une voiture légère.

Un jeune ingénieur s'efforce actuellement de mettre au point une voiture de 300 kilos à vide faisant 40 kilomètres à l'heure avec 75 kilomètres d'autonomie. Les accus se rechargent à l'aide d'une prise de courant ordinaire, ceci pour une dépense d'environ 7 centimes au kilomètre.

Ce même constructeur pense que dans un an nous aurons des voitures roulant à 75 kilomètres à l'heure avec une autonomie de 150 kilomètres.

 Le seul point noir est la question des matières premières. Il faudrait environ 5 kilos de cuivre et 5 kilos de caoutchou pour construire une telle voiture. Il se peut d'ailleurs que le cuivre soit prochainement remplacé par l'aluminium, notamment en ce qui concerne les bobinages.

En résumé, voici une industrie bien française, qui permettra peut-être de résoudre le délicat problèmes des transports.

Source : le journal "La Croix" du 26 août 1941.

Témoignage d’un enseignant de l’Institut Lemonnier :

Nuit du 5 au 6 juin… Comme tous les Caennais et les habitants de la côte, nous sommes réveillés en sursaut par la canonnade monstre qui parvient de la mer… Cette fois on n’en peut douter « ça y est… » et chacun de sauter à bas du lit pour essayer de se rendre compte de l’ampleur du débarquement.

Mais à part le rougeoiement qui s’étendait à l’Ouest, sur la côte, et l’immense nappe de fumée qui roulait sur l’horizon, impossible, même du haut de l’atelier de mécanique, de rien discerner… Aussi chacun, ayant tari ses commentaires, regagna son lit qui frissonnait sous les coups lointains des obus pleuvant sur la côte et essaya de dormir… Quelques heures plus tard nous étions tous de nouveau sur pieds échangeant nos impressions et nous demandant si nous n’allions pas, d’un moment à l’autre ; nous trouver en plein baroud…

Ça ne devait pas tarder…

A une heure et demie de l’après-midi une nuée de bombardiers apparut à l’horizon, venant de la mer, et se dirigeant sur nous.

Quelques minutes après des quartiers entiers de la ville étaient en ruines et en flammes. C’est à peine si on eut le temps de réaliser le malheur.

Personnellement, je venais d’écouter sur un poste à galène l’émission spéciale qui donnait de Londres les premiers détails concernant le débarquement et je sortais de chez le Père Directeur, à qui je venais de les communiquer, quand je vis choir sur la menuiserie trois bombes tandis qu’une dizaine d’autres tombaient, avec un bruit que nous n’oublierons plus, dans un rayon de vingt à cinquante mètres.

Perdus dans une âcre fumée de poussière qui m’aveuglait, m’étouffait et me crissait sous les dents, recroquevillé à terre, criant des supplications au Ciel, j’entendis, dans un vacarme indescriptible, fait de fracas des vitres et des tuiles qui tombaient, des portes et des fenêtres , des cloisons et des charpentes qui se disloquaient, des cris d’effroi, des gémissements et des appels… C’était atroce.

Et les bombardiers s’éloignèrent…

L’atmosphère à peine éclaircie, par je ne sais quel instinct, nous nous retrouvâmes groupés, alors qu’avant les bombardements nous étions dispersés aux quatre coins de la maison. Deux confrères, MM Robino et Le Ru, ainsi que trois enfants, étaient plus ou moins grièvement blessés. Deux autres supérieurs, le père Gouriou et l’abbé Pincé, manquaient à l’appel ainsi que trois élèves.

Sur les cours, recouvertes de tuiles brisées et de poussières, d’arbres déchiquetés, de portes, de volets et de fenêtres arrachées, on ne distinguait aucune forme humaine… Au bout d’un moment un garçon s’écria à travers un rire nerveux et saccadé, qui faisait mal : « J’étais avec eux dans la menuiserie et je suis juste sorti quand elle tombait ! Les malheureux ! Comment les découvrir dans ce fatras de ferraille tordue, de tôles ondulées, de planches brisées et de briques écornées ?...»

Le petit Blassy fut retrouvé le premier, dans la cour du voisin, où il avait été projeté par le souffle, par de-là le mur. Il avait la tête à moitié emportée. Roland Sale fut aperçu ensuite. Il semblait à peine assoupi, encore chaud. Et ne fut-ce le trou profond qu’il avait derrière la tête, du côté de l’oreille droite d’où suintait un sang noirâtre, on eut pu croire qu’il s’en tirerait à bon compte. Malheureusement, lui aussi était mort.

Contre toute espérance on continua à fouiller sur l’emplacement de la menuiserie. Tout à coup un appel retentit : c’était M Pincé qui appelait au secours et, pendant qu’on le dégageait, une nouvelle voix s’éleva, aiguë et haletante, celle de Marie Ange. Sur ces entrefaits, le père Gouriou rentra de la ville où le bombardement l’avait surpris.

Les premières bombes tombées sur Caen avaient fait chez nous deux morts et sept blessés. On les transporta tous à l’hospice Saint Louis et aussitôt on se remit à aménager les tranchées creusées au fond du jardin en 1940. Nous nous y abritâmes la nuit du 6 au 7 juin qui fut épouvantable pour les quartiers du centre de la ville. Une immense lueur montant du quartier Saint-Jean éclairait sinistrement notre abri. … 

Source : « Caen Normandie 44, liberté pour l’Europe », journal de la ville de Caen n°32 du 6 juin 1984, page 37.

"Répétition générale"mais il ne faut pas que la pièce soit jouée :

Bastille : (de Luc Decaunes)

"Dans le faubourg, aux abords de la Bastille, je me heurte à des petits paquets de promeneurs figés au bord des trottoirs. Je m'imagine que c'est samedi pu veille de fête. Les gens sont de sortie exceptionnelle : le spactacle est dans la rue. Pour un peu, on se croirait un soir du 14 juillet, avant le feu d'artifice. On a amené les mioches voir "l'attaque aérienne"; Ca promet d'être intéressant. ... Le spectacle d'un nouveau genre reste un jeu mais auquel se mêle secrêtement une gravité sourde de fait historique. ...

Brusquement, la plainte rauque d'une sirène fend le ciel. Aussitôt, deux, trois, vingt, cinquante sirènes jaillissent, se heurtent, se croissent, tissent au-dessus de Paris un filet d'angoisse.

-Alors c'est la guerre dit quelqu'un derrière moi.

- C'est la civilisation fait un autre...

... Tout s'est éteint. Les cafés ont voilé leurs éclairages. Des lampes bleus et rouges ponstuent la nuit.

- Les voic, crie une voix. Les têtes se lèvent.

Deux avions lâchent leurs fusées dans le ciel noir. ...

Boulevards : (d'Albert Soullillou)

...

Champs Elysées : (de G. Iveton)

 "Dès neuf heures, l'avenue des Champs Elysées est noire... de monde. Beaucoup ont en effet jugé que le lieu était propice pour jouir du spectacle, pour voir la nuit tomber d'un coup sur ce chapelet de lumière, un peu copurbé, qui va de l'Arc de Triomphe au Louvre. Chacun a ce petit air dégagé qu'on se donne quand on veut pas semblé préoccupé par la pensée qui domine l'esprit de tous vos voisins. Les messieurs sifflotent et les dames chantonnent. Tout le "huitème", la moitié du "seizième" est là. Il y a dans l'atmosphère une odeur de cigare et de parfums chers qui ne trompe pas. ...

A tout hasard, les garçons, ce soir, prient les clientsde "payer en servant". Le Fouquet's s'est tout entier déjà plongé dans le nuit. ...

Neuf heures et quart ... le cri des sirènes déchire la nuit. Cri étonnant, en dehors du sens précis qu'il prend ce soir, ce hululement gigantesque a quelque chose d'animal qui vous prend aux entrailles.

En dix secondes, les enseignes lumineuses s'évanouissent. Cette bleue, cette rouge, cette jaune, cette mauve, cette blanche disparaissent. On dirait que l'avenue est un immense jeu de massacre et que des boules invisibles aveuglent chaque maison.

Les sirènes broient le silence dans leur meule sonore. L'avenue est éclairée au gaz, les voici touchés, ils s'éteignent graduellement, gentiment; ... Puis plus rien : c'est la nuit.

Les autos depuis longtemps, tous phares éteints, ont stoppé le long du trottoir. Ce qui est étonnant, c'est la docilité avec laquelle la foule se prête à cette pièce formidable qu'on lui fait jouer. ... "

Source : Revue "Regards" n°145 du jeudi 22 Octobre 1936. 

La journée du 7 mai 1944 a été pourtant particulièrement belle : c’était jour de communion solennelle. L’occasion d’oublier pour quelques heures la dure réalité de l’Occupation allemande.

Ce bonheur prend fin brutalement à 23h45 lorsque les sirènes de Saint-Jacques sonnent l’alerte. Une pluie de bombes s’abat alors sur la ville, durant vingt-cinq interminables minutes. Bruz n’est plus qu’un amas de décombres ravagé par des incendies. Les survivants quittent les ruines de leurs habitations pour se précipiter au secours des blessés.

L'’accalmie est de courte durée. Deux minutes à peine après la première attaque, une seconde vague vient faucher les courageux citoyens venus secourir leurs voisins, allongeant encore la liste des victimes.

Les premiers sauveteurs venus de la campagne environnante et des bourgades voisines découvrent une vision d’apocalypse. Il s’agit avant tout de sauver des flammes ceux qui n’ont pas péri sous les bombes et restent prisonniers des décombres. 

Le dévouement de tous est magnifique, et l’hospitalité des fermes les plus proches facilitera grandement la tâche des médecins et des infirmiers.

Ce bombardement dévastateur est l'oeuvre de la Royal Air Force. On dénombre quelque 183 morts, 300 blessés et 600 sinistrés, sur une population de 2800 habitants.
L’objectif était en fait le dépôt de munitions du bois des Ormeaux.C’est donc à la suite d’une erreur de balisage que les aviateurs britanniques ont largué leurs bombes sur la commune.

Source : le site de la commune de Bruz.

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"Ma chère Thérèse,

Nous venons de nous coucher quand les avions commencent à se faire entendre, puis des fusées. Nous nous levons aussitôt et attendons. Alors commence un tintamarre infernal (Bruz est à 2 km en ligne droite d'ici). Les fenêtres de la véranda s'ouvrent toutes seules; nous descendons sur le perron. La maison est secouée de fond en comble. Cela dure 20 à 25 minutes : une vision d'enfer.

Des bruits des bombes, de la DCA et surtout des avions. Chaque bombe déclenche une gerbe de feu et un incendie. Quand tout est fini nous remontons : Bruz flambe toute la nuit, le clocher de l'église illuminé comme par des projecteur. 

A la maison rien de cassé sauf un morceau de plafond de la véranda qui est tombé. Les maires de Saint Erblon et des communes environnantes réveillent les hommes et tous partent à Bruz mais ne peuvent entrer dans le bourg car tout flambe.

Le lendemain matin nous partons tous aux nouvelles d'amis et pour aider au déblaiement. En arrivant au bas de la côte du cimetière, alerte : les survivants de Bruz se sauvent comme des fous. Nous entrons d'abord dans le cimetière labouré de bombes : des morceaux de cercueil sur la route, des pierres tombales à 2 ou 300 mètres; un corps dressé, un cadavre enterré depuis peu fait une masse sanguinolente et nauséabonde qui git au oied de la croix. Quelques tombes dont la nôtre restent intactes, ce sont les seules. Nous partons peu après ne pouvant supporter l'odeur.

Bruz n'est plus qu'un amoncellement de ruines fumantes au milieu desquelles se trouve Mme Hégron méconnaissable de peur et d'émotion : on vient de la dégager, elle et son mari, au moment où le feu les atteignait. Son mari blessé au bras, aux jambes et à la tête est transporté d'urgence à Rennes. De leur maison, nous ne dégageons que leur argenterie tordue, 1/4 de matelas brûlant, 2 couvertures, 2 coussins et des choses dérisoires (une tasse, une photo, ...). Dans toutes les maisons c'est la même chose : naturellement il y a des pillards qui sont appréhendés. 

Je me rappellerai toute ma vie les blessés qu'on porte en ambulance, la minute de silence à chaque fois que l'on retire un mort, les cadavres qu'on porte en civière recouverts d'un drap, le sang bu par la poussière, les os calcinés qu'on ramasse dans des seaux, le feu qui couve partout, les pierres brûlantes qui, lorsqu'on les fait basculer par mégarde découvrent le feu qui jaillit; la chaleure étouffante, l a poussière de phosphore qui nous prend à la gorge, qui pique les yeux. On a les lèvres en sang.

... Des familles entières sont anéanties. C'est le soir des fêtes de communion : on retrouve des morceaux de mousseline blanche, des brassards, des pieds, des mains...

Ninette (20 ans habitante au Pont-Péan)"

Source : "Paroles d'Ombre" de JP Guéno.

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Le rapport de la RAF :

Deux objectifs ont été assignés séparément aux Avro Lancaster B II. du groupe 1 du Bomber Command, ayant décollé du terrain d'aviation de Wickenby (nord-est de l'Angleterre), dont ceux du squadron 12 de la RAF, du 460e squadron australien et des 576e et 625e squadrons canadiens: l'aérodrome de Rennes - Saint-Jacques et un dépôt de munitions, situé dans le bois des Ormeaux, protégé par une batterie de 6 canons de 88mm - à 1,4 km au nord du clocher de l'église de Bruz.

« 7/8 mai: 55 Lancasters du groupe n°1 bombardèrent le terrain d’aviation et un dépôt de munitions à Rennes. La force ne fut pas en mesure de localiser et marquer la cible correctement et la plupart des bombes tombèrent sur un village voisin. Pas de perte d’appareil. »

Source : Bomber Command. RAF Campaign Diary May 1944

 

Source : http://www.convoyweb.org.uk

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ete44_jyetaitNotre but principal est de maintenir et faire revivre la mémoire de la "Libération" en l'expliquant à tous les publics via des expositions et l'organisation d'évènements commémoratifs. Mais avant, il faut replacer les événements dans leur contexte d'où notre intérêt pour les années précédentes et les témoignages relatifs à cette période.

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