"Répétition générale"mais il ne faut pas que la pièce soit jouée :
Bastille : (de Luc Decaunes)
"Dans le faubourg, aux abords de la Bastille, je me heurte à des petits paquets de promeneurs figés au bord des trottoirs. Je m'imagine que c'est samedi pu veille de fête. Les gens sont de sortie exceptionnelle : le spactacle est dans la rue. Pour un peu, on se croirait un soir du 14 juillet, avant le feu d'artifice. On a amené les mioches voir "l'attaque aérienne"; Ca promet d'être intéressant. ... Le spectacle d'un nouveau genre reste un jeu mais auquel se mêle secrêtement une gravité sourde de fait historique. ...
Brusquement, la plainte rauque d'une sirène fend le ciel. Aussitôt, deux, trois, vingt, cinquante sirènes jaillissent, se heurtent, se croissent, tissent au-dessus de Paris un filet d'angoisse.
-Alors c'est la guerre dit quelqu'un derrière moi.
- C'est la civilisation fait un autre...
... Tout s'est éteint. Les cafés ont voilé leurs éclairages. Des lampes bleus et rouges ponstuent la nuit.
- Les voic, crie une voix. Les têtes se lèvent.
Deux avions lâchent leurs fusées dans le ciel noir. ...
Boulevards : (d'Albert Soullillou)
...
Champs Elysées : (de G. Iveton)
"Dès neuf heures, l'avenue des Champs Elysées est noire... de monde. Beaucoup ont en effet jugé que le lieu était propice pour jouir du spectacle, pour voir la nuit tomber d'un coup sur ce chapelet de lumière, un peu copurbé, qui va de l'Arc de Triomphe au Louvre. Chacun a ce petit air dégagé qu'on se donne quand on veut pas semblé préoccupé par la pensée qui domine l'esprit de tous vos voisins. Les messieurs sifflotent et les dames chantonnent. Tout le "huitème", la moitié du "seizième" est là. Il y a dans l'atmosphère une odeur de cigare et de parfums chers qui ne trompe pas. ...
A tout hasard, les garçons, ce soir, prient les clientsde "payer en servant". Le Fouquet's s'est tout entier déjà plongé dans le nuit. ...
Neuf heures et quart ... le cri des sirènes déchire la nuit. Cri étonnant, en dehors du sens précis qu'il prend ce soir, ce hululement gigantesque a quelque chose d'animal qui vous prend aux entrailles.
En dix secondes, les enseignes lumineuses s'évanouissent. Cette bleue, cette rouge, cette jaune, cette mauve, cette blanche disparaissent. On dirait que l'avenue est un immense jeu de massacre et que des boules invisibles aveuglent chaque maison.
Les sirènes broient le silence dans leur meule sonore. L'avenue est éclairée au gaz, les voici touchés, ils s'éteignent graduellement, gentiment; ... Puis plus rien : c'est la nuit.
Les autos depuis longtemps, tous phares éteints, ont stoppé le long du trottoir. Ce qui est étonnant, c'est la docilité avec laquelle la foule se prête à cette pièce formidable qu'on lui fait jouer. ... "
Source : Revue "Regards" n°145 du jeudi 22 Octobre 1936.
- la Défénse Passive (la DP) pour lutter contre les effets des bombardements.
Et malheureusement, la seconde allait devoir fonctionner à plein régime quelques années après...
Et bravo pour cette article !