Extrait du chapitre « petit para, c’est aujourd’hui ta fête… » où il va conté avec humour son stage à fort Benning, Columbus en Georgie au sein de la compagnie 116 (ou 116éme promotion), pour obtenir sa certification paratrooper.
« Au centre de parachutage, l’entraînement comportait quatre phases. A chacune d’elles présidait un capitaine, assisté d’une paire de lieutenants et d’une douzaine de sergents en renfort. On avait sélectionné des instructeurs aussi vaches que compétents. La sanction classique de toute infraction, vraie ou fausse, aux règles était vingt-cinq tractions sur les avant-bras. Ils ne badinaient pas non-plus avec les manifestations extérieures de respect et les officiers élèves n’avaient pas la vie plus douce, au contraire, que les élèves de moindre grade.
La première phase du stage débuta par des hurlements de la part des instructeurs ...
... , auxquels répondit une fuite en avant de la part des élèves. Non pas un petit trot paisible ou une brève course de vitesse. Il s’agissait d’un truc à vous sécher les poumons, apparemment interminable, et toujours les coudes au corps. … Quand on en arrivait au point où toute respiration se révélait impossible, nos instructeurs ordonnaient un parcours du combattant.
C’est à ce moment-là que les gars se mettaient à tomber. Chaque fois qu’un élève capotait de la sorte, un instructeur adjoint s’empressait auprès de lui pour le ranimer, le remettre sur pieds et s’assurer qu’il rejoigne le peloton. Y parvenir pouvait prendre trois à quatre heure. Mais il fallait y arriver et par ses propres moyens !
Ce qui survivaient à cette première épreuve avaient l’agréable perspective d’une grimpée de sept mètres à des cordes accrochées à tout ce qui semblaient pouvoir supporter un poids humain. Monter à toute vitesse, descendre lentement, voilà, ce que l’on devait faire. En ce qui me concernait, c’était l’inverse !
On en arrivait aux massues. Maudit soit celui qui les inventa ! Quand on les saisit, elles ne pèsent rien. Cinq minutes plus tard, on jurerait qu’Atlas vous a repassé son fardeau. Tôt ou tard – pour moi, c’était tôt – on en laissait tomber au moins une. D’où, conséquence : on se laissait tomber aussi – ça, c’était facile – et faire des tractions. Cela tandis qu’un instructeur vous accablait de sarcasmes tout en maniant ses massues comme s’il se fût agi de plumes. Sa dernière flèche faisait le plus mal :
Vous pouvez me flanquer vos massues à la tête. Je ne m’y oppose pas !
… En tout cas, il ne risquait rien. Nos doigts étaient si mous que les massues nous glissaient des mains. Jour après jours, pendant une semaine, je m’efforçai de lui en projeter une sur le crâne. Tout juste si je parvins à écraser le pied de mon plus proche collègue-en-tortures…
Ensuite venait la fosse à sciure, qui n’avait pas l’air bien méchante la première fois qu’on en entendait parler. Mais après cette première fois j’ai vu des costauds pâlir et de moins costauds défaillir quand retentissaient l’ordre : « A la fosse ! ». On nous y exténuait si bien pendant cinquante minutes que j’ai vu des hommes essayer de s’en extraire au dernier coup de sifflet de l’instructeur et ne pas réussir à se hisser pardessus la palissade de trente centimètres qui l’entourait. Ils suppliaient leurs camarades moins mal en point :
Pour l’amour de Dieu, sortez-moi de là avant l’arrivée des autres !
La course, la corde, les massues, la fosse et autres gentillesses analogues durèrent six jours. Ceux qui se révélaient incapables de suivre étaient éliminés mais ils pouvaient recommencer s’ils en exprimaient le désir. Car rien n’empêchait quiconque de répéter l’expérience. Un lieutenant s’y reprit à trois fois avant que le psychiatre local s’aperçut que c’était un masochiste !