Le 14 juin, l'affolement régnait dans le sud du département de la Seine et Oise. Nul ne savait que faire, rester ou partir et les ordres officiels manquaient. On venait d'évacuer les blessés militaires.
Sept infirmières gardaient l'hôpital d'Orsay, où demeuraient impossibles à évacuer sept incurables : M Victor Lemascher, 54 ans; Mlle Joséphine Demek et Marie Labrousse, 94 ans; une octogénaire Mlle Léontine Huguelin; Mlle Augustine Pontier, 76 ans; une jeune paralytique de 23 ans et M Le Brun.
Fallait-il laisser ces épaves humaines courir le risque de la bataille ou simplement les abandonner et les laisser mourir faute de soins quotidiens et attentifs qui leurs étaient nécessaires ?
Les infirmières se concertèrent. Dans l'affolement général, trois d'entre'elles décidèrent de partiquer sur ces impotents des piqûres mortelles qui mettraient fin, pensaient-elles, et à leur vie misérable et aux problèmes que posait l'impossible évacuation.
Les seringues de Pravaz entrèrent en jeu. Strychnine, orvipan, morphine furent inoculés à hautes doses. On descendit ensuite les corps à la morgue de l'hôpital.
Mais dans le cercueil qui lui était déjà préparé, l'un d'entre eux s'éveilla : M Le Brun. Quant l'ambulancier M Lévêque vint le matin pour clouer la bière, le vieillard s'agita sous sa planche!
La dose n'avait pu avoir raison de lui. Et c'est ainsi que l'histoire fut connue.
Les infirmières, mlle Viviane Brouilly, Madeleine Artus et Jeanne Roulet ne nient pas les faits. Elles arguent du cas de conscience affolant qui s'est posé à elles. Elles ajoutent d'ailleurs, avoir reçu l'ordre d'un médecin-major inconnu et de l'économe Mme Bourseau.
Les trois jeunes filles sont arrêtées. Et un cas exceptionnel, angoissant , de psychologie va se poser devant le jury de Versailles, réputés pourtant pour son exceptionnel sévérité.
Souce :